Le Rhum

Ce premier article traitera de la fabrication et de la consommation du rhum. Le prochain article évoquera l’histoire du rhum.

Quand on parle de rhum, il convient de distinguer le rhum agricole, fabriqué à partir du jus de canne à sucre (il faut 10 kg de canne à sucre pour faire 1 litre de rhum agricole) et le rhum, dit traditionnel ou de mélasse ou industriel ; qui est réalisé à partir de la mélasse, c’est-à-dire le sous-produit de la fabrication du sucre. Le rhum traditionnel est moins coûteux et très nettement moins goûteux, il représente néanmoins 90% des ventes mondiales. Il existe autant de différence entre les rhums qu’entre un grand cru de vin et du vin de table en bouteille de plastique. 

Les rhums ont vu le jour dans les Caraïbes. Le tafia ancêtre du rhum était la boisson des marins, des pirates et des flibustiers probablement avant 1600. Les premiers rhums ont été produits vers 1650, tandis que le premier rhum agricole tel qu’on le connait aujourd’hui aurait été produit vers 1880 aux Antilles françaises grâce à l’évolution des techniques de distillation. 

Il convient ensuite de distinguer au sein des rhums agricoles, le rhum blanc et le rhum vieux, ainsi que le rhum paille. Le rhum blanc, c’est le premier produit qui sort de la distillerie. Il est ensuite vieilli dans un fut en bois (du chêne pour les rhums de Martinique). La Martinique est particulièrement réputée pour ses rhums, notamment les rhums vieux. Les rhums de la Martinique ont été les premiers produits de l’outre-mer français à bénéficier d’une appellation d’origine contrôlée (AOC) en 1996.

Un rhum vieilli moins de 3 ans¹ est un rhum paille, c’est-à-dire qu’il est légèrement coloré. Viennent ensuite les rhums vieux qui, du fait de leur AOC, sont classés comme les autres spiritueux en France : VO (very old), VSOP (very special old pale) et XO (extra old) en fonction de la durée du vieillissement : 3 ans  minimum pour un rhum VO,² 4 ans pour un VSOP et 5³ ans pour XO. Certains rhums vieux peuvent avoir 8/10/12 ans de vieillissement. Il s’agit alors d’un rhum hors d’âge. 

Il existe mille et une façon de boire du rhum. Aux Antilles française, le rhum est le plus couramment consommé sous forme de ti-punch (une mesure de sucre ou de sirop de sucre, un zeste de citron et quatre ou cinq mesures du rhum blanc) ou le planteur (cocktail à base de rhum environ un quart de rhum, du sirop de sucre, du jus de citron, et 2/3 de jus de fruit – le plus apprécié, est généralement un mélange de goyave et d’orange – quelques épices, agrémentent le cocktail, vanille, cannelle, muscade, etc.). D’autres cocktails sont bien connus, et font rêver comme la pina colada, avec du lait de coco, la caïpirinha au Brésil ou le daiquiri (comme le ti-punch à base de « CRS » : citron, rhum, sucre, mais dans proportions différentes) mojito (avec de la menthe et de l’eau gazeuse) ou le Cuba libré (avec du Coca Cola).

En France (rhums des Antilles) il existe plusieurs teneurs en alcool, pour les rhums blancs 50°, 55° très souvent consommé. Le titrage en alcool de 55 ou 60° permet de mieux révéler les saveurs, le bouquet, 62° ; ainsi que du 70° plus rare. Plus récemment on trouve du 40° pour les cocktails dans les bars probablement (teneur en alcool voisine de la cachaça). Les rhums vieux ont une teneur en alcool, moins élevé autour de 40-45°.

Il existe actuellement 22 marques de rhums en Martinique, ce nombre est en augmentation (il y en avait 16, il y a 30 ans). Il n’existe que 7 distilleries dites « fumantes »⁴ c’est-à-dire qui distillent le vesou (jus de la canne à sucre) mais 12 variétés de cannes à sucre (canne verte, fer, bleue, rouge, roseau, cristalline etc..), ce qui laisse de grandes variétés gustatives, sans compter les méthode de vieillissement propres à chaque marque.

Hormis les rhums de Martinique, tous agricoles, il en existe en Guadeloupe (Damoizeau), en Guyane (Belle Cabresse), en Haïti (Barbancourt), en Jamaïque (Appeleton Estate), au Guatemala (Zacapa), au Vénézuela (Diplomatico), au Brésil (la cachaça en general), et même au Japon (Ryoma), etc..

Derniers éléments d’informations. Les rhums français misent sur les qualités gustatives pures du produit (rhums agricole en particulier), les rhums traditionnels sont améliorés gustativement sous forme de rhums dit « arrangés ». Les rhums d’influence anglo-saxonne sont généralement produits à partir de la mélasse, mais avec les années certains rhums de mélasse ont développé des qualités gustatives satisfaisantes. Les rhums d’influence hispaniques sont parfois plus travaillés. En valeur, en 2022, les ventes de spiritueux représentaient 40% des ventes totales de boissons alcoolisées dans le monde, suivis par la bière (38,1%) et le vin (17,6%). Mais en volume, la bière représentait 75% du total des boissons alcoolisées vendues en 2022, suivie par le vin (10,4%) et les spiritueux⁵ (9,9%). A terme, le volume de spiritueux pourrait donc dépasser celui du vin d’ici 2027.

1.  18 mois minimum. L’appellation « élevé sous-bois » est un rhum dont le vieillissement a été de 12 mois.
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2.  Egalement les appellations : réserve spéciale ou cuvée spéciale. ↩︎
3.  Egalement des appellations : hors d’âge ou extra vieux ou vieille réserve. ↩︎
4. Liste des distilleries fumantes et des 22 marques produites par distillerie en gras. En italique les marques récentes – une marque existant il y a 30 ans n’est plus commercialisée : Bernus – ou distillerie récente ou ré-ouverte) : A1710 (hors AOC – distillerie Habitation Le Simon), Depaz et Dillon, JM, La Favorite, La Mauny plus les marques Trois Rivières et Duquesne, Neisson, Saint James plus les marques : Bally, Madkaud, Hardy, Maniba, Baie des Trésors et La Salle. Distillerie Simon : Clément et HSE (Habitation St Etienne), distillerie Grand Fonds : Braud et Quenesson et distillerie Beauséjour :  HBS.
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5.  Le spiritueux largement le plus vendu est le soju (alcool de riz) qui représente environ 1/3 des volumes de vente au niveau mondial devant (dans l’ordre) le whisky, le rhum, la vodka puis suivent dans le désordre cognac, vermouth, liqueurs… La marque de soju Jinro en 2019 représente environ 70 % des ventes mondiales de soju (776 millions de litres en 2019). Par comparaison, le whisky le plus vendu est le Mac Dowell’s (276 millions de litres en 2019, mais 10 marques vendent 75 millions de litres ou plus). Le rhum le plus vendu est philippin : Tanduay (184 millions de litres en 2019). ↩︎

H. Marion